1999 : innover dans les formes d’organisation – Décongeler les structures de la CGT #1

Publié le par Baptiste, Michel

Depuis plusieurs dizaines d’années, la CGT fait le constat que ses structures ne permettent plus de répondre aux évolutions du capitalisme, et qu’il faut les transformer pour rester en capacité d’affirmer un syndicalisme qui permette d’exercer réellement un rapport de forces. Du rapport Warcholak de 1980 au 53e congrès, passage en revue de 45 ans d’immobilisme sur les structures de la CGT.

Pour cet épisode, un extrait du document d’orientation du 46e congrès conféréral qui s’est tenu en 1999 à Strasbourg. Nous reproduisons une partie du Chapitre 4 : « Accélérer le renouveau de la CGT ». Sous une forme concise et efficace, le texte voté fait un constat réaliste sur l’évolution du salariat et son décalage avec les organisations syndicales (nourri par un rapport préalable discuté en Comité confédéral national). Le problème des syndiqué·es isolé·es est déjà identifié, de même que la direction des réponses à y apporter : décloisonner les structures, attribuer davantage de moyens aux organisations en contact direct avec les salarié·es… Les solutions restent assez larges et la forme interrogative : il s’agit alors d’ouvrir le débat.

Innover dans les formes d’organisation de la vie syndicale

Aujourd’hui le syndicat professionnel d’entreprise reste la forme d’organisation la plus répandue dans la CGT. Mais les modifications profondes qui s’opèrent dans le travail et le salariat qui renforce le besoin de développer par l’ensemble de la CGT dans toutes ses composantes, un syndicalisme de proximité, nous conduisent à explorer des pistes nouvelles pour permettre à d’autres salariés de rejoindre la CGT. […]

Les syndiqués « isolés »

Aucun syndiqué ne doit être « isolé ». Pourtant il en existe : syndiqués en contrat de travail à durée déterminée qui ont parfois plusieurs employeurs dans l’année et peuvent passer dans plusieurs professions, syndiqués multi-employeurs, syndiqués de très petites entreprises où le droit syndical n’existe pas, syndiqués retraités. Le développement de ce type de syndicalisation nécessite de trouver avec ces syndiqués les formes souples d’organisation leur permettant de participer pleinement à l’ensemble de l’activité CGT.

L’union locale est l’un des atouts importants pour répondre à ces objectifs. […]

Le site, une notion innovante

Dans plusieurs sites à dominante industrielle, les salariés des entreprises sous-traitantes se sont organisés avec l’aide active de la CGT de l’entreprise donneuse d’ordre.

Le syndicat multiprofessionnel de site, union de syndicats, coordination de sites : les formes d’organisation sont diversifiées. Mais elles traduisent toutes le souci d’une meilleure visibilité et efficacité de la CGT sur l’ensemble du site, sans gommer les particularités professionnelles propres à chaque entreprise.

Comment mieux faire connaître ces types de structuration syndicale pour systématiquement une démarche de création de bases dans les secteurs à forte concentration de salariés, mais éclatés dans une multitude d’entreprises ? […]

Quelle structuration pour la CGT ?

Les transformations profondes intervenues dans la société française ont conduit à des modifications dans notre organisation. Effectuées « en ordre dispersé », elles peuvent manquer de cohérence.

La CGT s’est créée par regroupement d’organisations professionnelles et territoriales chacune porteuse d’une dimension historique du syndicalisme français. La place de la branche, comme lieu déterminant pour l’élaboration des garanties collectives a donné aux fédérations un rôle revendicatif prépondérant. Les nécessités de l’activité revendicative aujourd’hui conduisent, en s’appuyant sur notre mode de vie fondé sur le fédéralisme, à des rapprochements, des convergences, des initiatives communes sur des aspects de plus en plus essentiels de la vie syndicale pour toutes les organisations CGT. Il est aujourd’hui indispensable d’aller plus loin dans cette direction. Tout repli d’une organisation sur elle-même fragiliserait l’ensemble de la CGT. L’efficacité suppose informations, mise en commun, regroupements ponctuels ou structures nouvelles suivant les situations.

Les problèmes touchant à la structuration des activités CGT ne peuvent être abordés de façon cloisonnée par les seules fédérations pour la dimension professionnelle ou par les seules unions départementales pour la dimension interprofessionnelle.

La référence aux activités et aux territoires concerne tout autant les fédérations que les unions départementales et la confédération. Nous sommes confrontés à la nécessité de conduire des transformations dans l’ensemble des organisations dans trois directions : structuration et financement des organisations, règles de fonctionnement et partage des responsabilités.

Il apparaît nécessaire de développer une conception de la coopération qui, à chaque fois qu’une nouvelle question surgit, amène les différents acteurs concernés les aspects territoriaux et professionnels pour élaborer des réponses CGT. L’efficacité du combat syndical exige une véritable synergie entre le « professionnel » et « l’interprofessionnel », à l’opposé de toute conception de partage des tâches.

La mise en commun des réflexions, des expériences et des moyens entre organisations est indispensable, elle doit se développer pour être profitable à tous et à chacun et doit conduire à poser sereinement la question des évolutions dans les structures de la CGT.

Avons-nous les outils permettant la mise en œuvre de nos orientations ? Comment permettre l’expression de ce syndicalisme de proximité au service de notre démarche revendicative afin d’investir tous les terrains ?

Au plan professionnel, il est devenu nécessaire de procéder à une révision des champs d’activité des fédérations, qui articulerait une meilleure approche des problèmes communs tout en favorisant l’expression d’identités professionnelles internes.

Les modifications des champs d’intervention des collectivités territoriales, la décentralisation, les bouleversements des lieux de production et d’échange, les lieux de lutte et de rassemblement des salariés questionnent unions locales, unions départementales et comités régionaux sur leurs rôles respectifs. Nous avons besoin de construire entre ces trois structures en lien avec les branches professionnelles, des articulations nouvelles faisant évoluer le champ de leur responsabilité.

La priorité que nous affirmons au développement des outils CGT qui sont directement au contact des salariés, syndicats et unions locales, doit se traduire par des moyens supplémentaires à ces niveaux-là. L’ensemble de ces réflexions doit déboucher sur une plus grande efficacité du travail confédéral et de ses organismes de direction au service de toutes les organisations de la CGT.