2003 : charte de la vie syndicale – Décongeler les structures de la CGT #2
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Depuis plusieurs dizaines d’années, la CGT fait le constat que ses structures ne permettent plus de répondre aux évolutions du capitalisme, et qu’il faut les transformer pour rester en capacité d’affirmer un syndicalisme qui permette d’exercer réellement un rapport de forces. Du rapport Warcholak de 1980 au 53e congrès, passage en revue de 45 ans d’immobilisme sur les structures de la CGT.
Lors du 47e congrès à Montpellier en 2003, les effectifs ont augmenté (+ 50 000 depuis le précédent congrès), l’heure n’est pas à vouloir tout changer. Le travail entamé 4 ans auparavant donne lieu à l’adoption d’une charte de la vie syndicale. Ce texte lucide est l’une des trois chartes fondamentales qui encadrent l’activité syndicale au sein de la CGT, et fournit à ce titre un appui encore utile aujourd’hui pour décrire les bonnes pratiques syndicales – à imprimer et diffuser largement dans les structures de la CGT. Pour le reste, comme le texte en fait lui-même le constat, « trop peu d’organisations se sont engagées dans de telles voies »… Et les formules creuses qui le parsèment (« prendre des dispositions concrètes » sans dire lesquelles, « poursuivre et accentuer la syndicalisation », etc.) et l’absence de tout objectif concret et écrit en toute lettre laissaient augurer de ce qui se passerait ensuite : rien.
Résolution 3 : Adopter une charte de la vie syndicale et poursuivre les réflexions sur les transformations de la CGT
La CGT est confrontée à la nécessité de trouver des formes d’organisation et de fonctionnement qui concrétisent les changements qu’elle souhaite impulser pour être davantage en phase avec le monde du travail.
Ces changements impliquent notamment l’amélioration de la qualité de la vie syndicale et le développement d’un syndicalisme de proximité, au plus près des syndiqués et des salariés, favorisant leur engagement dans le syndicalisme.
Le rapport d’activité identifie les avancées et les difficultés rencontrées pour accélérer le renouveau de la CGT. Il souligne notamment que « de nombreux salariés sont disponibles pour s’investir dans le syndicalisme de conquêtes que nous voulons porter, dès lors qu’ils peuvent apprécier en direct notre démarche ».
La charte de la vie syndicale que nous proposons au 47e congrès d’adopter se donne pour ambitions :
- de traduire en objectifs précis, concrets, les décisions de nos derniers congrès et comités confédéraux pour un progrès important de la syndicalisation, indissociable de celui de l’amélioration de la qualité de vie syndicale ;
- de réaffirmer et préciser nos règles de vie telles que les définissent nos statuts ;
- de proposer quelques pistes de transformations susceptibles de nous aider efficacement dans nos objectifs de conquêtes.
Elle se situe délibérément dans le cadre des « outils actuels dont dispose la CGT et qui lui ont permis et lui permettent encore une défense effective des salariés tant au niveau des entreprises où elle est implantée qu’au niveau des branches professionnelles et de l’interprofessionnel ». Adoptée, elle est une décision des syndicats pour que toute la CGT s’engage immédiatement dans sa mise en œuvre.
Elle est complétée par une réflexion sur les transformations dans lesquelles la CGT doit s’engager sur les plans professionnel et interprofessionnel pour mieux intégrer les évolutions et les mutations intervenues et à venir dans la société, et en particulier dans le monde du travail.
[…]
- d’impulser la création et la coordination de syndicats de site ou de zone pour notamment regrouper les syndiqués isolés, travaillant souvent en situation précaire dans de très petites voire moyennes entreprises regroupant fréquemment un salariat féminin et jeune ou issu de l’immigration ;
- de passer à une autre étape de la syndicalisation des salariés des entreprises sous-traitantes intégrées dans des sites industriels, commerciaux ou administratifs et de coordonner systématiquement l’activité syndicale avec les syndicats ou sections syndicales des entreprises donneuses d’ordres en évitant toute tutelle des uns sur les autres ;
- d’identifier, d’organiser et de renforcer une activité spécifique pour les cadres et les professions techniciennes ;
- de généraliser l’expérience de collectifs de retraités dans les cités, les quartiers, les localités pour aller à la rencontre des retraités là où ils se trouvent ;
- de développer la syndicalisation et l’organisation des salariés privés d’emploi à partir de ces mêmes lieux de vie (cités, quartiers, localités…) ;
- de poursuivre et d’accentuer la syndicalisation dans les syndicats existants ;
- de prendre des dispositions concrètes pour assurer la continuité syndicale actif/retraité pour ne plus perdre deux syndiqués sur trois au moment du départ à la retraite ;
- de systématiser la prise de dispositions concrètes par chaque syndicat et section syndicale pour qu’ils proposent aux salariés des entreprises et services proches de se syndiquer et de s’organiser.
Ce qui appelle pour toutes les organisations la mise en œuvre pleine et entière de l’article 21 des statuts de la CGT : elles « recherchent entre elles, en permanence, la coopération, la complémentarité avec les autres composantes de la CGT, la prise en compte des intérêts communs à l’ensemble des salariés ».
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Suivre chaque syndiqué dans son parcours personnel
En adhérant à la CGT, le salarié adhère à un syndicat confédéré. Si le parcours professionnel ou la mobilité géographique le nécessite (changement d’employeur, d’activité professionnelle, de catégorie, passage à la retraite, mais aussi travail intérimaire, saisonnier, employeurs multiples…) il revient à la CGT de faire en sorte que ces changements de situation du syndiqué n’aient pas comme conséquence une rupture de l’adhésion.
- invite tous les syndicats de la CGT à prendre des dispositions pour suivre plus systématiquement le parcours personnel de chaque syndiqué à la CGT et à faire circuler les informations entre les structures de l’organisation ;
- mandate le Comité confédéral national pour définir de nouvelles modalités de suivi et de continuité de l’adhésion pour les syndiqués à la CGT.
Afin de faciliter toutes ces opérations, et plus largement les échanges d’informations entre les différentes organisations et organismes pour une meilleure connaissance de la syndicalisation et des syndiqués, il est souhaitable d’utiliser et de partager les moyens de la communication électronique, dont le CoGiTiel est l’outil de base que la CGT développe.
Réflexions sur les transformations de la CGT
Un collectif confédéral a été mis en place à l’issue du 46e congrès pour travailler sur l’évolution des modes de fonctionnement et de la structuration de la CGT à partir du besoin des syndiqués et des salariés.
Les objectifs poursuivis sont :
- gagner en efficacité en cernant mieux le rôle et les responsabilités de chacun, en recherchant des modes de fonctionnement favorisant complémentarité et synergie ;
- déployer la CGT sur l’ensemble du salariat et construire pour cela les espaces et les outils les plus pertinents pour favoriser les solidarités, la construction des rapports de forces, l’intervention des salariés sur tout ce qui les concerne ;
- mettre en phase notre structuration et nos modes de fonctionnement avec nos ambitions de nouvelles conquêtes sociales à partir des besoins des salariés. Les enjeux d’un nouveau statut du travail salarié et de nouvelles garanties collectives, de nouveaux statuts pour les salariés dans les grandes branches d’activités, sont ainsi au cœur de certaines propositions ;
- concevoir nos transformations en termes de processus, associant l’ensemble des acteurs concernés, en premier lieu les syndiqués et leurs syndicats, pour déterminer les objectifs à atteindre et les moyens de les atteindre, à l’opposé donc de tout schéma préétabli.
Si la réflexion est loin d’être achevée, des organisations s’inscrivant dans la volonté d’atteindre ces objectifs ont d’ores et déjà, seules ou en coopération, modifié leurs modes de fonctionnement, mis de nouveaux dispositifs en place, tenté des expériences :
- ressentant le besoin d’aborder ensemble certains enjeux concernant tout ou partie du salariat qui leur est commun, certaines fédérations ont mis en place des formes de coordination plus ou moins souples, plus ou moins permanentes ;
- en visant une implantation et un fonctionnement plus efficaces, de nombreuses expérimentations ont été menées concernant les unions locales : nouveaux découpages territoriaux, décentralisations d’unions locales, antennes d’unions locales sur des zones ou des sites, syndicats ou unions de syndicats de site. Ce qui doit dominer, c’est la volonté de mettre en place une proximité géographique en phase avec notre démarche de responsabilisation et de mise en mouvement du plus grand nombre de syndiqués et de déploiement de la CGT sur l’ensemble du salariat ;
- des comités régionaux, les unions départementales et unions locales, là où elles existent, ont travaillé à confédéraliser sur l’ensemble de leurs territoires les enjeux liés au développement des activités humaines à partir des besoins des salariés. Santé, transports, énergie, communication, éducation/formation, logement, développement industriel, rôle de l’État au sens large (fonction publique, collectivités locales, décentralisation, etc.), questions européennes et relations transfrontalières (liste non exhaustive), sur toutes ces questions, les régions sont en effet des espaces territoriaux et institutionnels pertinents de mise en cohérence et d’intervention.
Cependant, trop peu d’organisations se sont engagées dans de telles voies, ce qui en limite à la fois la portée et les enseignements que l’on peut en tirer, limitant ainsi la réflexion collective.
Pourtant, les transformations du salariat et des entreprises et services s’accélèrent, l’importance des enjeux territoriaux s’accentue. Il est devenu indispensable de mener la réflexion à son terme pour dégager des critères communs fédérateurs tant sur le plan professionnel que sur le plan territorial.