Un fonctionnement en silos ou "C’est qui ce mec ?" – Échos de l’interpro #2
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Le silo : c’est l’image d’une partie du fonctionnement interne de la CGT entre ses différentes structures. Et notamment, entre les fédérations et les unions interprofessionnelles, locales et départementales. Illustration, parmi tant d’autres.
Un mail arrive dans la boîte de l’Union locale. Un camarade, inconnu de l’UL, demande à être mandaté pour les prochaines élections au CSE. On prend donc contact avant, pour savoir de quoi il en retourne. Parce qu’on n’arrive pas à le trouver dans les adhérent.es dits « isolé·es » de l’union locale. C’est qui ce mec ?
Il assure être adhérent à la CGT, la preuve, c’est qu’il paie par prélèvement une cotisation mensuelle. Ok, mais où ? A quelle structure ? Parce qu’à la CGT ça peut être, comment dire, compliqué ? Il ne sait pas.
Après quelques recherches, il s’avère qu’il avait adhéré en ligne. Et que son adhésion a basculé vers une fédération qui a mis en place le prélèvement fédéral pour des adhérent.es isolé·es.
Et oui, il y a les isolé·es dans les unions locales, mais il peut aussi y en avoir par les fédérations. Normal, la lecture très particulière du « fédéralisme » permet de faire vraiment ce que l’on veut à la CGT. Et donc de laisser sans aucune connaissance de part et d’autre, du professionnel et de l’interprofessionnel, de l’existence de certain·es adhérent.es.
Ce camarade, camarade depuis plusieurs années donc, était élu sans étiquette, il a rejoint la CGT et maintenant il souhaite la représenter. Mais comme la fédération n’a pas informé l’union locale, celle-ci ne savait pas qu’il y avait un adhérent dans cette entreprise, représentant du personnel. Ce qui aurait permis de lui proposer de se rencontrer, de l’aider, de s’informer, de lui proposer de venir aux AG de l’union locale, de mettre en place une stratégie pour les élections qui arrivent, etc. Autant de choses dont on peut douter que la fédération, située à plusieurs centaines de kilomètres, ait pu les faire…
Il est même arrivé de recevoir de cette fédération un chèque, à l’ordre de l’union locale, correspondant à la part des cotisations revenant au syndicat : information prise, il s’agissait d’un adhérent qui avait pris contact avec la fédération CGT de sa branche, et y avait adhéré, depuis plusieurs années…
On retrouve aussi ce genre de situation avec les syndicats nationaux de la CGT. Peut-être que parmi elles et eux, il y aurait des personnes intéressées pour participer aux réunions d’une union locale, voire devenir militant·e !
« Chacun dans son tube ! »
Mais non, chacun dans son coin : « mon » UL, « mon » syndicat, « ma » fédération. Et continuons à nous tirer des balles dans les pieds… du moment que le soi-disant « fédéralisme » est sauf.
On ne dénonce pas ici des personnes, on ne pointe pas du doigt telle ou telle structure. On illustre un état d’esprit. On est d’abord « CGT » ou « CGT machin truc » ? Voilà la question.
Échos de l’interpro
Dans cette rubrique, on raconte des petites anecdotes révélatrices de la place de l’interpro dans nos syndicats – pour partager un truc qui marche bien, ou au contraire pour râler contre ce qui freine l’activité syndicale.
Les faits racontés ici ne représentent pas forcément la situation générale. Mais on sait aussi qu’ils ne sont pas isolés ou accidentels, voire même plutôt habituels. Ils sont le reflet d’une des principales difficultés rencontrées par tout le syndicalisme de luttes : le manque de liens, l’isolement dans le mille-feuilles des structures, etc. Conséquence : un rapport de force qui penche plutôt du côté de l’État et du capital, l’usure des équipes militantes de l’interpro de proximité, et les difficultés à trouver de nouvelles équipes pour prendre la suite des militant·es qui sont sur le départ. Il ne s’agit pas de distribuer des bons ou des mauvais points à des camarades qui auraient une bonne ou une mauvaise pratique, car ce n’est pas une question de personnes. Celles-ci militent dans un cadre donné, et ce cadre a indéniablement une influence sur nos propres pratiques à toutes et tous. C’est ce cadre qu’il s’agit d’interroger.
Ces chroniques doivent nous servir à faire évoluer notre cadre commun : à vos claviers pour nous envoyer à votre tour de petits récits de la vie dans vos unions locales ou départementales !